Massacre de dauphins, pêcheurs de l'ombre et abandon d'un projet de mine en Australie ? Tout ça, et beaucoup de jeux de mots, c'est dans La Corneille !
Mercredi 22 février 2023
Chères Corneilles,
Bienvenue dans ce 6ème courrier.
Cette fois, j’ai décidé de commencer en douceur.
Comme la brume sur les eaux tranquilles du lac d’Annecy, je voudrais que mes mots vous enveloppent.
Une étreinte. Une caresse sur vos pensées agitées.
Que vous me lisiez entre deux dossiers classifiés “URGENT” ou sur les bords d’un sentier de campagne, je vous souhaite d’être surpris par le monde qui vous entoure. Mais si, vous savez ! Ce rayon de soleil chatoyant qui perce entre les rideaux, ce chant d’une mésange bleue qui, par on ne sait quel miracle, parvient à se faufiler entre les vrombissements des voitures ou simplement l’odeur de la pluie…
La vie. Frémissante et pleine de promesses.
Les odeurs. Puissantes et évocatrices.
Elles vous entourent.
Sentez, ressentez, vivez tout simplement.
Bonne lecture...
Quand même Flipper, commence à flipper…
Les images sont violentes, mais là où le gouvernement français préfère fermer les yeux, il nous faut parfois regarder la vérité en face : nous détruisons le vivant.
Vous avez peut être vu ce sujet passer dans les médias et le temps presse. Le dauphin commun, une espèce protégée en France et en Europe, est victime d’un massacre pur et simple. Depuis le début de l’hiver, 400 dépouilles ont pu être retrouvées sur le littoral français.
Selon les observations et autopsies réalisées par les scientifiques de l’observatoire Pelagis, aucun doute, ils ont en grande majorité été victimes d’engins de pêche. Cette surmortalité déplorable ne serait donc que l’un des multiples effets pervers de méthodes de pêche non-sélectives. Entendez par là que les chaluts pélagiques et les fileyeurs attrapent tout ce qui passe sur leur chemin, dauphins et autres espèces non-visées y compris. Autre fait marquant, certains dauphins ont été retrouvés mutilés intentionnellement. Une pratique utilisée par les pêcheurs pour “couler” les dauphins et minimiser leur impact.
Le phénomène a d’ailleurs pris une telle ampleur que, selon les estimations, la mortalité annuelle sur les côtes atlantiques serait comprise entre 8 000 et 11 000 individus. La population de l’espèce est, elle, d'environ 180 000 à 200 000.
Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir tenté d’alerter les autorités.
Depuis maintenant plusieurs années, la Commission européenne, les scientifiques du CIEM (organe scientifique en charge de la surveillance des écosystèmes de l’Atlantique nord) et les ONG, parmi lesquelles Sea Sheperd, demandent une suspension hivernale de ces pratiques. Cette mesure a été rejetée par l’État qui a préféré répondre aux demandes des pêcheurs industriels.
En lieu et place de la suspension, l’État a finalement accepté de prendre ce sujet à bras le corps (spoiler alert : pas du tout), en proposant un plan en 8 points. Et oui, pourquoi mettre en place une mesure justifiée scientifiquement lorsque l’on peut en proposer… 8 expérimentales ?
Au programme de ce spectacle de claquettes :
des caméras embarquées (pour regarder le massacre des dauphins en replay, pratique) ;
des répulsifs acoustiques (à ajouter à votre panoplie de l’été contre les moustiques) ;
Depuis, le contact entre ONG et pêcheurs est rompu . Ces derniers, ayant oublié comment communiquer, ont d’ailleurs préféré scarifié le corps d’un dauphin avec le message suivant “Sea Sheperd PD”. Très classe.
L’association a annoncé avoir déposé plainte contre X “pour mutilation d’espèce protégée” et a demandé “l’ouverture d’une enquête pour identifier les pêcheurs qui ont commis cet acte barbare”.
(France24 ; Libération)
Vous souhaitez vous engager sur ce sujet ?
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“Un peuple d’aveugles, finit par tuer tous ses loups” (exactement ce qu’Agatha Christie nous aurait dit face à cette nouvelle…). La semaine dernière, je vous parlais de la relation passionnelle entre notre cher gouvernement et les chasseurs. Et bien, désolée de vous décevoir, mais là aussi, ce n’est pas une exception française. Nos amis suédois sont tout aussi attachés à cette belle tradition qui veut que l’Homme extermine tout ce qui menace son petit mode de vie. Cependant, après avoir décimé les populations de cerfs et élans... Les chasseurs font face à un problème : les loups ont perdu leur principale source de nourriture et doivent la remplacer. Ils se tournent alors vers le bétail comme les moutons. Autour du loup d’être l'objet de persécution, et cette fois ci, par le gouvernement. Malgré l’opposition de la Commission Européenne et l’alerte des scientifiques, 54 loups ont déjà été abattus depuis le début de l’année 2023. Ouaip, une espèce qualifiée comme “très menacée” en Suède et “strictement protégée” selon la Convention de Berne (ratifiée par le gouvernement) est donc désormais persona non grata. (Le Monde)
Consanguinité dans le Jura… Autre grand carnivore, autre problématique ! Dans le Jura, c’est le lynx boréal, un félin rare et mystérieux qui est menacé… Alors qu’au 18ème siècle il avait disparu de nos montagnes, c’est suite à un programme de réintroduction lancé dans les années 1970s en Suisse qu’il était parvenu à se ré-établir dans les hauteurs jurassiennes. Estimés au nombre de 120 à 150 adultes, les lynx font face à de nombreuses pressions parmi lesquelles la chasse, la perte de leur habitat et surtout les collisions avec des voitures. Mais, ce n’est pas tout (ça ne serait pas marrant sinon !)… Une étude réalisée par le Centre Athenas entre 2008 et 2020 a permis de collecter l’ADN de 88 individus blessés, tués ou orphelins. L’objectif était de faire un point sur la santé génétique de la population et les résultats ne sont pas bons. Le niveau de diversité observé est équivalent à celui de 38 d’individus. Concrètement, il y a trop peu de lynx pour qu’un vrai brassage génétique puisse s’effectuer. La capacité de la population à résister aux maladies et aux changements climatiques s’en trouve donc sérieusement affectée. Si rien n’est fait, la France pourrait à nouveau voir le lynx, un espèce centrale dans l’équilibre de cet écosystème, disparaître d’ici 30 ans. (The Guardian)
Chat bien là ! Franchement, on a rarement été aussi heureux de retrouver des crottes ! Fin janvier, deux scientifiques ont confirmé avoir relevé sur le Mont Everest des excréments de deux individus du matou le plus stylé : le chat de Pallas ! L’air toujours blasé, il est un peu la version féline d’un Gen-Z, à cela près qu’il ne passe pas ses journées sur TikTok et qu’il est considéré comme une espèce menacée. Dans le monde, on compte aujourd’hui 50 à 60 000 de ces chats. Oui, c’est peu ! En comparaison, on dénombre rien qu’en France jusqu’à 15 millions de chats domestiques. (Linfo.re)
Le plomb ? Ni dans l’aile, ni dans les zones humides ! Voté en novembre 2020 par le Parlement européen, l’interdiction de l’utilisation de munitions au plomb va être interdite dans toutes les zones humides d’Europe dès le 15 février ! N’en déplaise aux bonshommes à fusils, mobilisés depuis des années pour empêcher une telle mesure de passer, cette annonce est une victoire pour la santé publique et la biodiversité. Un avis de l’agence des produits chimiques de la Commission européenne avait notamment dévoilé que tous les ans, les 100 000 tonnes de métal dispersés dans l’environnement menacés d’empoisonnement par ingestion 127 millions d’oiseaux. Et, pour nous les humains, le constat n’était guère plus réjouissant. À l’échelle de l’Europe, 1 million de bambins “voient leur développement neurologique menacé par la consommation de gibier contaminé au plomb”. (The Guardian)
Le voleur d’oiseaux, en cage. Je ne sais pas vous, mais moi, lorsque j’entends le chant magnifique d’un oiseau, je suis prise par l’envie de me transformer en une Cendrillon des temps modernes. Je chanterais des chansons niaises dans lesquelles un stupide Prince viendrait me sauver de l’enfer de la Start-up nation.. La la la… Et puis, le joli cui-cui viendrait se poser dans ma main et on deviendrait potes. Si, je suis assez saine d’esprit pour laisser les ptits oiseaux tranquilles, il semblerait que ce ne soit pas le cas de tout le monde. Insaf Ali, s’est ainsi vu arrêté à l’aéroport international de New-York en possession de 18 passereaux emprisonnés dans des bigoudis (AH). Accrochez-vous… Le boug rapportait des oiseaux de Guyane pour participer à des compétitions de chants d’oiseaux et il avait déjà été condamné pour trafic d’animaux. Bref, les Disney c’est fini pour moi. (Washington Post)
Les pêcheurs de l’ombre. 3 compagnies d’assurances londoniennes (the Britannia Steam Ship Insurance Association Ltd, British Marine and MS Amlin) sont accusées par l’ONG “Blue Marine Foundation” de permettre à des bateaux de pêche opérant dans l’Océan Indien de passer sous les radars. Selon les investigations de l’association de protection des océans, 46 navires de pêche ne respecteraient pas le droit international ainsi que de l'État côtier en éteignant leur équipement obligatoire de géolocalisation. Ces bateaux, détenus majoritairement par des compagnies espagnoles et françaises, utiliseraient cette technique pour conduire des activités illégales comme pêcher dans des zones interdites. Problème, les assureurs n’opèrent aucun suivi sur cette obligation et continuent ainsi de couvrir des entreprises aux pratiques illégales. Afin de pousser le secteur des assurances à améliorer ses pratiques, l’ONG a déposé une plainte auprès de l’Autorité de conduite financière et de l’Autorité de régulation prudentielle (deux organisations chargées de réglementer les activités des acteurs du secteur financier au Royaume-Uni). (The Guardian)
Center Pa(rc)s dans la forêt. “Des vacances en nature pour seulement 128€ !”. Décidément, ce ne sont pas seulement les tarifs de l’entreprise de tourisme qui se veulent low-cost… Alors que le groupe propriétaire de Center Parcs a annoncé “vouloir baisser de 46% ses émissions de gaz à effet de serre en exploitation d’ici 2030”, il semblerait que ses engagements sur la biodiversité soient eux aussi au rabais. En creusant un peu, on apprend donc que l’entreprise prévoyait de construire un nouveau parc de vacances dans la forêt de Worth au Royaume-Uni. Si ce n’est pour la mobilisation des citoyens, les espèces d’oiseaux rares comme l’autour des Palombes, les becs-croisés et le roitelet à triple bandeau, auraient été contraints de partager (lol) leur habitat avec 900 pavillons et autres structures pour nos touristes en manque de nature (re-lol). Encore plus marrant lorsque l’on sait qu’en Janvier 2022, c’est suite à une décision du tribunal administratif de Rouen que Center Parcs avait été contraint d’abandonner son projet d’extension de 2 500km2 dans le domaine des Bois-Francs dans l’Eure. (Ouest France ; Surrey Live)
Ça mine pas l’Australie. Parfois, les politiques nous surprennent. Et quand je dis ça, je ne parle pas d’une proposition débile pour créer une app de signalement des chasseurs ou autre connerie… Non, je parle d’une bonne surprise. Tenez, prenez l’Australie ! Pourtant pas connu pour ses prises de position contre l’industrie des énergies fossiles, son gouvernement vient de s’opposer pour la première fois à l’ouverture d’une nouvelle mine de charbon. Nos nouveaux défenseurs de l’environnement préférés, on décidé d’utiliser un loi de protection de l’environnement et de la biodiversité votée il y a 22 ans pour entériner le projet de mine de charbon à ciel ouvert qui devait se situer à seulement 10 km de la Grande barrière de corail. Hâte de voir si la même chose adviendra de la 20aine d’autres projets (tout aussi inquiétants pour le vivant) prévus dans le pays ! (RFI)
Psst, “La voie est (bientôt) libre”. Si vous me suivez sur les réseaux sociaux, vous devez savoir que je milite depuis 5 ans pour la justice climatique. Des débats sur les plateaux TV aux mobilisations dans la rue en passant par des rencontres en off avec des dirigeants d’entreprises, nous sommes nombreux à multiplier les modes d’action pour gagner quelques victoires. Ces victoires, même si elles ne parviennent pas à masquer la multitude de mauvaises nouvelles, existent bel et bien ! Pour cela, ce sont les collectifs citoyens et les ONG que nous devons remercier. Alors aujourd’hui, je souhaitais vous parler de “La voie est libre”, l’un de ces collectifs qui s’engage contre le projet de l’Autoroute A69 entre Castres et Toulouse. Selon les informations, 400 hectares de terre risqueraient d’être artificialisés pour une estimation de 5640 véhicules par jours et 15 minutes de temps de trajet en moins. Je ne sais pas vous, mais je dirais que les calculs ne sont pas bons. Nouveau rebondissement, suite à la découverte de géotextiles placés sans autorisation dans des cavités pour empêcher le nichage d’animaux, l’association France Nature Environnement a déposé une plainte contre l’entreprise à l’origine du projet autoroutier. Une enquête a été ouverte par le parquet de Castres et pourrait mettre à mal les ambitions de nos bitumeurs ! (Touléco)
Le président malgache l'avait promis : " Madagascar sera désormais l'île verte"
3 ans après, de retour de Madagascar, la couleur dont je me souviens le plus est un rouge vif. Le rouge de la terre nue à perte de vue. Le rouge de l'eau des pluies cycloniques qui dévale les pentes à toute allure et avale le peu de nutriments encore présents au sol. Le rouge des morceaux de terrain qui s'effondrent sous nos yeux par manque de racines pour les retenir et laissent des trous béants dans les paysages. Le rouge dans les regards des paysans qui peinent à survivre.
D'après nos partenaires du CIRAD, l’île a perdu 44 % de ses forêts naturelles depuis les années 50 et le rythme de la déforestation s’accélère. Avec 90 % d’espèces endémiques, Madagascar héberge une biodiversité exceptionnelle qui risque de disparaitre.
L’enjeu de l'île Rouge est de réconcilier la préservation de ces espèces naturelles avec la lutte contre la pauvreté. C'est ce que tente de faire au quotidien nos équipes chez Planète Urgence avec le soutien de l'Union Européenne, de l'Agence Française de Développement, de Davidson Consulting, de multiples partenaires entreprises donatrices, des ONG locales engagées et des représentants locaux.
Dans chaque localité, nous travaillons avec les communautés locales pour réduire la coupe forestière, proposer des alternatives économiques durables comme l’agroforesterie ou la rizipisciculture, restaurer la biodiversité, imaginer des aires protégées ou sensibiliser à l'environnement... C’est ainsi que de nouveaux équilibres entre développement humain et conservation de la biodiversité voient le jour sur les hauts plateaux pour protéger ce qui subsiste des forêts de Tapia. La réponse, pour être pertinente, doit prendre en compte les enjeux dans toute leur diversité et complexité.
Madagascar ne redeviendra pas verte du jour au lendemain, la perte forestière y a été trop importante et brutale. Il est cependant urgent d'être pragmatique et de protéger ce qui peut encore l'être pour que l'île ne devienne pas réellement monochrome.
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